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Dépôt d’une résolution transpartisane contre la ratification de l’accord UE Mercosur en l’état

Mathilde Dupré, 4 mai 2023

C’est assez rare pour être souligné. La position sur l’accord commercial entre l’Union européenne et le Mercosur est unanime : tel qu’il a été conçu, l’accord se traduira par des impacts sanitaires, environnementaux et sociaux élevés tant sur les consommateurs, les agriculteurs et les éleveurs européens, que les populations des pays du Mercosur. Dans cette résolution déposée conjointement par tous les groupes politiques (à l’exception du RN), les députés formulent trois demandes au gouvernement pour officialiser la position de la France concernant cet accord. Des demandes récemment identifiées dans un rapport publié par Interbev, la FNH et l’Institut Veblen, trois organisations qui se mobilisent depuis 2015 pour rendre le commerce international compatible avec les enjeux de souveraineté alimentaire et de transition écologique et sociale.

Trois demandes portées par les députés

Les députés François RUFFIN pour La France Insoumise, Pascal LECAMP pour le MODEM, Sébastien JUMEL pour la Gauche Démocrate et Républicaine, Frédéric DESCROZAILLE pour Renaissance, Marie POCHON pour les Ecologistes, Luc LAMIRAULT pour Horizons, Dominique POTIER pour les Socialistes et Julien DIVE pour Les Républicains, co-signataires de la proposition de résolution officiellement enregistrée en fin de semaine dernière, ont décidé d’adresser, ensemble, les demandes suivantes au Gouvernement :

  1. Communiquer à la Commission européenne et au Conseil l’opposition de la France à l’adoption de l’accord UE – Mercosur en l’absence d’un accès au marché européen conditionné au respect des normes de production européennes et de critères de durabilité et de traçabilité (notamment pour lutter contre la déforestation). Une mesure rendue possible à travers l’intégration de clauses de conditionnalité tarifaires, dites « clauses miroirs ».
    Les députés pointent également, dans la même logique, l’absence de clause suspensive relative au respect des engagements climatiques au titre de l’Accord de Paris comme un motif supplémentaire de blocage de l’accord.
  2. Faire savoir publiquement à la Commission européenne et au Conseil que la France s’oppose à l’adoption séparée du seul volet commercial de l’accord et que l’accord conclu dans son intégralité devra donc être soumis à la procédure de ratification prévue pour les accords mixtes, c’est-à-dire voté à l’unanimité des Etats membres au Conseil, puis au Parlement européen, puis par les Parlements nationaux.
  3. Généraliser le principe de réciprocité des normes de production dans les échanges commerciaux à travers l’intégration de mesures miroirs dans les propositions législatives en cours d’examen ou à venir dans le cadre du Pacte Vert.

Au regard de la volonté de la Commission européenne et de plusieurs Etats membres d’accélérer la ratification de l’accord UE-Mercosur, INTERBEV, la Fondation pour la Nature et l’Homme et l’Institut Veblen demandent à la Présidente et au Bureau de l’Assemblée Nationale d’inscrire ce texte transpartisan à l’ordre du jour avant l’été.

Notes aux rédactions :

  • L‘objectif de la Commission européenne est de finaliser les discussions en amont du sommet entre l’UE et la Communauté d’États latino-américains et caraïbes, prévu à Bruxelles les 17 et 18 juillet prochains.
  • Pour faciliter l’adoption de l’accord d’association UE-Mercosur, la Commission européenne propose d’adopter un document additionnel en parallèle. Une première version de ce document additionnel à l’accord UE-Mercosur préparée par la Commission européenne dans le plus grand secret a été divulguée en mars par l’ONG Friends of the Earth Europe. Mais ce projet de “déclaration conjointe”, censée apporter un certain nombre de garanties pour dépasser les fortes réserves exprimées par de nombreux Etats membres de l’UE depuis 2019, ne règle aucune des menaces environnementales, climatiques et sanitaires qui se concrétiseront si l’accord venait à être ratifié (voir notre analyse).
    Ce projet de déclaration aurait été présenté par les négociateurs européens aux pays du Mercosur mi-mars. Ces derniers le jugeant encore trop contraignant ont annoncé leur intention de mettre sur la table une proposition alternative.

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