Un spectre vient régulièrement hanter le monde de la pensée et les sociétés, celui du « marché ». Critiqué et écarté pendant les trois premiers quarts du XXe siècle, ce « marché » tiré de la théorie standard – abstrait, atemporel et autorégulateur – s’est réimposé avec force à partir des années 1980. La chute du Mur de Berlin et la fin de nombreuses dictatures dans les pays dits naguère « du Tiers Monde » avaient pu laisser croire que le marché libérait et était vecteur, voire synonyme, de démocratie. Mis en cause une nouvelle fois par la crise de 2007/08 et l’entrée de l’économie mondiale en récession, il est déjà de retour, souvent présenté comme une idée neuve.
Mais peut-on encore se faire des illusions au sujet du « marché » aujourd’hui, après trente ans d’hégémonie néolibérale et alors que les prétendues solutions à la crise actuelle impliquent de plus en plus de régressions démocratiques face aux exigences d’un nouvel ajustement structurel à destination des pays « développés » ? Si le marché peut émanciper aujourd’hui, ce n’est assurément pas comme principe unique appliqué de façon hégémonique et souvent autoritaire à l’ensemble des sociétés humaines. Il ne peut être émancipateur qu’en étant lié à d’autres principes, eux-mêmes guidés par un horizon démocratique et solidaire.
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