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La valeur travail peut-elle encore être de gauche ?

L’Economie Politique n°105 février - mars - avril

10 février 2025

Le travail reste une valeur centrale pour les Français, et pourtant de nombreuses études attestent de sa double crise.

D’une part, l’économie tout entière a été réorganisée pendant plus de trente ans de mondialisation, produisant un monde du travail de plus en plus fracturé et en perte de sens. De l’autre, les assauts idéologiques contre «  la société des assistés  » n’ont de cesse d’opposer ceux qui travaillent et les autres, et le discours sur la «  valeur travail  » pousse à la réduction des protections sociales.

Une politique de progrès doit chercher des réponses sur ces deux plans à la fois : réorganiser l’économie et redonner le sens à la valeur du travail.

- Le 5 mars 2025, venez assister à notre table ronde sur le sujet

« Nous avons chacun le droit de représenter la France qui travaille », s’insurgeait Valéry Giscard d’Estaing face à François Mitterrand dans leur premier débat pour la présidentielle de 1974. A distance, ces mots mettent en relief le front inversé d’aujourd’hui, où c’est plutôt à la gauche de tenter de récupérer un discours capté par la droite et, de plus en plus, par l’extrême droite. D’élection en élection, la sociologie électorale rappelle cruellement le manque de crédibilité

des partis de gauche auprès des nombreuses couches sociales qui, naguère, avaient placé en eux leurs espoirs. Cet éloignement progressif n’est pas le fruit du hasard, il témoigne de décennies de déceptions et de promesses non tenues, de toutes ces postures gratuites dont la gauche française connaît le secret…

Pour relativiser, rappelons-nous cependant que les causes et les effets sont à peu près les mêmes partout, comme en témoigne la seconde victoire de Donald Trump aux élections présidentielles américaines. La crise du travail n’est pas étrangère à la montée des populismes qui transforme peu à peu le paysage démocratique en Europe et au-delà.

Il ne suffira pas de mieux « communiquer » avec les classes laborieuses et les perdants de la mondialisation pour inverser ces tendances de fond. C’est l’économie tout entière qui a été réorganisée pendant plus de trente ans de mondialisation, produisant des gagnants et des perdants, vidant la France d’une bonne partie de son tissu productif au motif d’augmenter le pouvoir d’achat des consommateurs, et faisant du coût du travail la variable d’ajustement. L’Etat social s’est développé en parallèle pour corriger en partie les effets de ces transformations et protéger contre les risques sociaux.

Mais il est sous pression constante, financière et idéologique, illustrée par la rhétorique qui n’a de cesse d’opposer les « lève-tôt » et les « assistés  », ceux qui travaillent et les autres. Les contributions à ce numéro proposent une double réponse : rendre plus visibles les mutations du travail et les mécanismes de valorisation et dévalorisation des différents métiers et, sur cette base, chercher à mieux articuler les intérêts des catégories « perdantes ».

Le moment est propice pour rebattre les cartes, car l’ère de la mondialisation libérale s’achève ; l’Europe veut se réindustrialiser et protéger son économie, comme le font les autres puissances mondiales. L’avenir dira si la gauche française et européenne saisira l’occasion pour proposer un programme économique renouvelé.

Retrouvez l’Edito complet, en cliquant ici

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