En préparation à la COP21, les chefs d’Etat prient les grandes banques et investisseurs privés de s’intéresser à l’enjeu climatique. Quel en sera le résultat quand on sait que la financiarisation – à travers 20 ans de dérèglementation – a imposé à l’économie réelle une logique de profits à court terme ? Les rendements à court terme étant dépendants des
énergies fossiles, le véritable défi n’est pas seulement celui des montants des financements mais du modèle : il revient à la puissance publique de montrer le chemin d’une économiedurable qui doit impulser ses valeurs et ses besoins à la finance. C’est à cette condition que
le secteur financier pourra retrouver la confiance des citoyens.
Une approche structurelle de la question du financement des objectifs climatiques inclut cinq priorités :
1. Augmenter la capacité d’investissement de la puissance publique : l’histoire montre que les innovations les plus importantes ont bénéficié d’un engagement financier déterminé de l’Etat [1]. Comme le rappellent de nombreux économistes européens et américains [2], la restriction dogmatique du budget public est contre-productive dans la conjoncture actuelle. Elle empêche l’innovation indispensable à la transition.
2. Mettre un terme aux subventions aux énergies fossiles, estimées à $ 5.300 milliards par an [3], pour les réorienter vers le soutien aux objectifs climatiques.
3. Appeler le secteur privé à s’engager sur le climat : Ces cinq dernières années, les soutiens aux énergies fossiles des 25 plus grandes banques françaises et internationales ont été de sept à neuf fois plus importants que ceux alloués aux énergies renouvelables. Les 25 plus grandes banques internationales ont ainsi soutenu les fossiles à hauteur de 847 milliards d’euros contre seulement 89 milliards d’euros vers les renouvelables [4].
4. Aligner le secteur privé sur l’intérêt général par la réglementation : Les outils à la disposition des autorités publiques pour encadrer le désinvestissement des énergies fossiles et favoriser l’investissement « vert » existent et sont parfois déjà appliqués dans d’autres régions du monde [5] – taxe carbone, lignes directrices pour l’allocation du crédit, transparence systématique sur les bilans bancaires et fonds d’investissement et calcul de leur risque et performance carbone (l’Art. 173 de la Loi Transition Energétique française est un premier
pas), assouplissement quantitatif « vert », etc.
5. Promouvoir les modèles financiers pionniers : les bonnes pratiques des banquiers et investisseurs qui mettent l’intérêt général au coeur de leurs objectifs doivent s’étendre au système financier traditionnel. Usagers et citoyens ont un rôle à jouer à cet égard.
Les organisations de la société civile signataires préconisent ce changement de modèle et souhaitent être une force de propositions concrètes. Le danger du dérèglement climatique peut contribuer à transformer positivement la finance, là où la réforme post-2007/2008 s’est limitée à tenter de la stabiliser.
Signataires :
- Institut Veblen
- Finance Innovation Lab
- World Future Council
- Fondazione Culturale Responsabilità Etica
- Housing Europe
- Secours Catholique (Caritas France)
- Greenpeace International
- 350.org
- ShareAction
- Collectif Roosevelt
- Market Forces
- Oxfam France
- Banktrack
- Les Amis de la Terre France
- Fair Finance France
- Attac France
- Finance Watch